mardi 23 septembre 2014

Véhicule vendu, et après ?


Lorsque vous vous séparez de votre véhicule, il ne suffit pas de se borner à recevoir le chèque de votre acheteur pour que tout soit terminé.

Imbroglio. C’est l’impression angoissée que doivent ressentir certains automobilistes après la vente de leur véhicule, pour peu qu’ils n’aient pas pris des précautions suffisantes.

Vous vendez votre véhicule, fort bien. Vous en retirez un bon prix, c’est encore mieux. Et vous croyez benoîtement pouvoir passer à autre chose, à l’achat d’un nouveau véhicule par exemple, en brandissant triomphalement votre chèque ? Erreur, parfois funeste. 

Il arrive parfois que le vendeur soit rattrapé par son passé si l’on ose dire. En effet, pour que la transaction portant sur votre véhicule soit actée juridiquement, c’est-à-dire qu’elle vous délivre de toute responsabilité, encore faut-il que l’administration en soit dûment informée.

Ils sont nombreux à croire qu’il suffit de remettre à l’acheteur, en échange de son chèque, la carte grise barrée du véhicule en question pour être quitte. Et si d’aventure ledit acheteur « omettait » de faire enregistrer son acquisition en préfecture, comme il en a l’obligation, afin de se faire délivrer une nouvelle carte grise ? Cela signifierait tout simplement que le véhicule n’aurait jamais d’être votre propriété : en conséquence de quoi, par exemple, toutes les contraventions postérieures à la vente vous reviendraient immanquablement.

Est-ce à croire que le vendeur serait, de ce point de vue, à la merci d’un acheteur peu scrupuleux ? Heureusement non ! Et ce n’est d’ailleurs pas en résiliant l’assurance de votre véhicule que vous seriez délivré de jure de toute responsabilité. Pour être obligatoire aux yeux de l’administration, le contrat d’assurance reste un acte privé qui ne constitue pas preuve. En revanche, il existe un document irréfutable qu’il vous faut conserver coûte que coûte après la vente de votre véhicule : le certificat de cession. 

C’est le document qui fait foi et entérine la transaction pour la puissance publique. Notons que ce certificat comporte trois volets : le premier est destiné à l’acheteur, le second au vendeur et le troisième à l’administration. Quel que soit le comportement ultérieur du vendeur, il vous appartient en tant qu’acheteur de faire parvenir aux services préfectoraux le volet qui lui revient. Cette démarche est impérative.

Quelques-uns d’entre vous, pour plus de sécurité, seraient-ils tentés d’apporter eux-mêmes en préfecture ce volet du certificat de cession ? Il ne s’agit hélas que d’une fausse sécurité dans la mesure où il advient – plus fréquemment qu’on ne l’imagine – que l’administration égare ce type de document. Or, au moment de sa remise au fonctionnaire préposé, il ne vous est délivré ni récépissé ni reçu prouvant que vous vous êtes bien acquitté de votre obligation. La meilleure sécurité reste encore d’adresser le document par voie postale, en recommandé avec AR.

L’autre sécurité consiste évidemment à conserver précieusement le volet qui vous est destiné et non à l’enfouir négligemment sous une pile de vieux papiers sans intérêt au risque de le perdre ; ou, pire encore, à le jeter à la poubelle en considérant que, le chèque de votre acheteur étant désormais encaissé, vous ne courez plus le moindre risque.

Trop d’automobilistes ont subi ce genre de désagrément de contraventions qui ne leur étaient pas destinées voire d’enlèvement en fourrière sans pouvoir cependant apporter la preuve de leur bonne foi. Malheureusement, le cas est presque devenu un classique lorsque le paiement de la transaction s’effectue en espèce, lorsqu’on a égaré le certificat de cession et lorsqu’on ne connaît évidemment pas le nom de l’acheteur. Là encore, cela n’arrive pas qu’aux autres.

dimanche 7 septembre 2014

Orange fatal


Si passer au feu orange est moins grave que « griller le feu rouge », cela pourrait tout de même vous occasionner quelques désagréments.

Vous l’aurez sans doute compris, l’adjectif du titre de cette chronique ne comporte pas de faute d’orthographe : ce qui est fatal n’est pas le fruit qui, avec la fin de l’été, va redevenir de saison mais bien ce qu’on appelle en jargon administratif (celui du Code de la route notamment) le « feu tricolore » qui lui, hélas, est toujours de saison même s’il est un mal nécessaire. 

Le jargon courant, celui des automobilistes, évoque traditionnellement l’« orange bien mûr » qui est censé se situer à mi-chemin entre le feu vert et le feu rouge quoique davantage du côté de ce dernier. Là réside en somme toute l’ambiguïté du feu orange qui jouera souvent, n’en doutez pas, à votre détriment.

Rappelons donc la règle. Contrairement à ce qu’on croit généralement, l'arrêt au feu orange (l’article R. 412-31 du Code de la route, comme s’il voulait demeurer abscons et entretenir absolument la confusion, parle de « feu jaune »), tout comme celui au feu rouge, est obligatoire. 

Précisons qu’il l’est en ce qui concerne seulement le feu orange fixe car, dans son inépuisable inventivité, l’administration a également accouché d’un feu orange… clignotant : dans ce dernier cas (prévu par l’article R. 412-32 du Code), l’arrêt n’est pas obligatoire s’il n’entraîne pas de problème de sécurité particulier. Il a essentiellement pour objet d’attirer votre attention sur un danger spécifique. 

Mais revenons à l’orange fixe. S’il prescrit l’arrêt du véhicule, il ne s’en distingue pas moins du feu rouge qui impose impérativement l’arrêt immédiat du véhicule à hauteur d’une ligne matérialisée ou non sur la chaussée. Souvenons-nous, à toutes fins utiles, que le franchissement du feu rouge est puni sévèrement d’une contravention de 4ème classe (135 euros d’amende et retrait de 4 points du permis de conduire). Le non-respect du feu rouge est également passible d’une peine complémentaire de suspension du permis pour une durée maximale de trois ans (suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l'activité professionnelle).

L’arrêt au feu orange/jaune n’est, lui, obligatoire qu’en théorie. Dans la pratique, en effet, le Code de la route prévoit sagement le cas où, quand le feu passe du vert à l’orange, le conducteur ne peut plus arrêter son véhicule « dans des conditions de sécurité suffisantes ». Par exemple, en freinant brusquement, il peut surprendre le véhicule qui le précède et se faire heurter par celui-ci. Dans le cas inverse, celui où le conducteur pourrait stopper son véhicule mais s’abstient de le faire, la peine encourue est une contravention de 2ème classe (amende forfaitaire de 35 euros) qui n’entraîne pas cependant retrait de points ou suspension du permis.

Tout le problème, on l’aura compris, est d’affirmer avec certitude que tel conducteur est passé au rouge et non à l’orange. Si l’administration prévoit donc des circonstances particulières (simple clause de style ?), vous auriez tort d’imaginer que sa mansuétude est sans limite. 

On renonce ainsi à dénombrer les cas où les agents de la force publique considèrent d’instinct que le fait de passer à l’orange mérite d’être sanctionné, quelles que soient les circonstances. Inutile de préciser que, dans ce type de situation, toute contestation de votre part – amiable ou devant les tribunaux – est vouée à l’échec et ce, pour une raison fort simple : il est impossible à l’automobiliste d’apporter la preuve qu’il est passé à l’orange et non au rouge. En principe, la charge de la preuve incombe à l’administration mais, dans la pratique encore, elle s’identifie à l’allégation de l’agent assermenté. Dites-vous bien que le « parole contre parole » ne sera ici qu’une vue de l’esprit et que le doute ne vous profitera quasiment jamais.

En fin de compte, il y a lieu de se demander s’il ne faut pas saluer le déploiement progressif des radars « feu rouge » (au nombre de 712, en juin 2014) dans nos cités. Ces dispositifs verbalisent, en effet,  les conducteurs passés au rouge et non à l’orange. Ils résolvent ainsi de facto le problème de     l’« orange bien mûr », ce qui est un progrès indéniable. 

Il est vrai que, là aussi, peuvent apparaître des cas limites, pour lesquels le système automatisé n’apporte pas de solution véritable et qui tourneront là encore en défaveur de l’usager : par exemple, les automobilistes qui franchissent la fameuse « ligne d’effet de feu », laquelle déclenche le dispositif photographique, à leur corps défendant et pour des raisons de sécurité en cédant le passage à des véhicules prioritaires (véhicules de police, pompiers, ambulances). Reconnaissons toutefois que ces cas ne sont pas majoritaires, même s’ils entretiennent bien volontiers l’esprit légendaire de rouspétance propre à nos compatriotes …

jeudi 28 août 2014

Perdre son permis, perdre son emploi …



Perdre son permis de conduire peut entraîner des conséquences aussi désastreuses qu'insoupçonnées : perdre son emploi, par exemple.

Combien de gens ont fini par se retrouver sans travail après avoir perdu leur permis de conduire ? La statistique officielle s'abstient prudemment d'en faire état, préférant se borner à insister sur les risques pour la société de la dangerosité au volant. Pourtant ce genre de situation est plus répandu qu'on ne le croit et il apparaît d’autant plus douloureux en ces temps de chômage endémique. 

Ainsi de ce maçon qui, après avoir perdu ses douze points de permis ayant entraîné l’invalidation de celui-ci, a été remercié par son employeur. La raison en était évidente : ne pouvant plus se rendre sur ses chantiers en voiture, il avait dû emprunter les transports en commun et était arrivé trop souvent en retard sur son lieu de travail. Comble de malchance dans son cas, arrivant tous les soirs tardivement chez lui, il avait été abandonné par son épouse qui se sentait elle-même délaissée …

Situation tragi-comique ? Voire. Il faut ne jamais avoir mis les pieds dans un prétoire pour se gausser de ces petits drames humains aux conséquences parfois imprévisibles. Dans le cas de notre maçon, ce dernier avait fait valoir cette situation délicate devant la justice administrative, dans le cadre d’un référé-suspension. Malheureusement pour lui, si la perte de ses douze points résultait en majeure partie d’une succession de petits excès de vitesse, il avait aussi à son actif un retrait de trois points pour téléphone au volant. Risque pour la société en raison d’une conduite dangereuse, a estimé impitoyablement le juge. 

On le voit, il existe bien un risque réel pour l’emploi en cas de perte du permis de conduire. En clair, un employeur peut licencier son employé si celui-ci vient à être privé de son permis. Il a cette possibilité quoique pas dans tous les cas de figure. A cet égard, il importe de savoir si la perte du permis de conduire de l’employé découle d’un fait commis dans le cadre de sa vie personnelle ou dans le cadre de son activité professionnelle.

En règle générale, aucun motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier un licenciement de nature disciplinaire. Par conséquent, si vous perdiez votre permis à la suite d’infractions commises à bord de votre véhicule personnel et non à bord d’un véhicule de l’entreprise, toute procédure de licenciement déclenchée à votre encontre sur le fondement d’une privation de permis de conduire serait illégale.

En revanche, l’employeur peut parfaitement engager une procédure de licenciement de son salarié si la perte du permis de conduire, quelles qu'en soient les circonstances, constitue un manquement de l’employé à une obligation découlant de son contrat de travail. L'employé se trouverait ainsi de fait dans l’impossibilité d’exercer la ou les missions pour lesquelles il a été embauché. L’employeur peut tout autant procéder à un licenciement dans l’hypothèse où la situation créée par la perte du permis est de nature à susciter, compte tenu de la nature des fonctions exercées par l’employé et de la finalité de l’entreprise, un trouble objectif – en d’autres termes, une désorganisation - caractérisé au sein de ladite entreprise.

Dans cette éventualité d’une perte du permis découlant d’une infraction au Code de la route commise dans l'exercice de la profession, l’employé peut se voir reprocher une faute grave (notamment lorsqu'il s'agit d'alcoolémie, de grand excès de vitesse ou d’usage intempestif du téléphone au volant) et licencié pour un motif disciplinaire. La jurisprudence a déjà tranché à maintes reprises en ce sens.

En bref, non seulement les conséquences d’une perte du permis de conduire ne sont pas neutres mais elles peuvent devenir dramatiques en termes d’emploi. Elles le seraient même dans le cas où l’invalidation du permis s'avérait ultérieurement injustifiée. En effet, si le permis de conduire devait retrouver sa validité à la suite d’un jugement annulant une décision administrative de suspension ou d’invalidation, tout licenciement prononcé dans l’intervalle serait déclaré sans cause réelle ou sérieuse. La justice considère ainsi que, si le licenciement était  légal au jour de son intervention, le retrait du permis de conduire du salarié doit être réputé n’être jamais intervenu et ne pouvait donc, d’un point de vue rétrospectif, justifier un licenciement.

Certes, la théorie est belle mais la pratique est souvent beaucoup plus amère car le licenciement, même déclaré injustifié après coup, n’en aurait pas moins causé un préjudice, parfois irréparable, à celui qui en aurait été victime.

samedi 16 août 2014

Un fléau bien caché



La drogue est en train de devenir un véritable fléau sur nos routes. Il est étrange que nos pouvoirs publics s'abstiennent de le dénoncer.
Pourquoi n’en parle-t-on que rarement ? Pourquoi, quand ils évoquent la délinquance routière, les pouvoirs publics dans un réflexe pavlovien continuent-ils de ne condamner que la vitesse au volant ?

Le fait est là : de plus en plus d’automobilistes conduisent aujourd’hui sous l’emprise de stupéfiants. Leur nombre ? On ne le connaît pas avec précision et d’ailleurs, les statistiques officielles le sous-estiment à peu près systématiquement. Pourtant, on sait déjà qu’en 2012, 531 personnes ont perdu la vie alors qu’au moins un des conducteurs en cause présentait un test positif aux stupéfiants. Et encore ce chiffre est loin de représenter la réalité, dans la mesure où, pour près de 4 accidents mortels sur 10, on n’enregistre pas le résultat toxicologique. A l’heure actuelle, selon l’ONISR (Observatoire national interministériel de la sécurité routière) la drogue serait impliquée dans 21% des accidents mortels sur nos routes : un sur cinq !

Alors pourquoi faire le black-out sur la question ? Certains allègueront un déficit objectif de connaissance joint à la difficulté des analyses, par comparaison avec l’alcool qui est plus aisé à dépister. En outre, les tests de recherche des stupéfiants reviennent fort cher. Pratiqué au bord de la route, le test salivaire revient à 12 euros l’unité et il faut y ajouter les frais d’analyse. En cas de test positif, une prise de sang est obligatoire pour vérifier le premier résultat. On parle d’analyses toxicologiques dont le coût maximal avoisinerait les 450 euros ! Il est vrai que le coût pour la société serait élevé. Mais ne nous a-t-on pas suffisamment asséné sur d’autres dossiers que la santé, a fortiori la vie, n’a pas de prix ? Sans compter, d’ailleurs, que ces coûts seraient non pas à la charge de la société mais du conducteur s’il s’avérait fautif … du moins quand il peut payer.

Là se situe en réalité le nœud du problème. En effet, la drogue majoritairement identifiée dans ces contrôles (en fait, dans 9 cas sur 10 !) est le cannabis dont les jeunes, a priori les moins solvables financièrement, sont les plus gros consommateurs. Alors, faut-il montrer les jeunes du doigt, sans même employer certains mots convenus de notre nov’langue comme « stigmatisation » ?

On comprend bien que le pouvoir socialiste, dont la jeunesse est un des fonds de commerce politique, puisse hésiter. On le comprend d’autant mieux à la lumière des efforts répétés de ce même pouvoir en vue de banaliser l’usage du cannabis : il n'est que de se rappeler les tentatives de l’ancien ministre de l’Education Vincent Peillon afin de laisser entrer le cannabis en toute impunité dans nos lycées et collèges ; il en va également ainsi d’autres tentatives, émanant celles-là de l’ancien maire de Paris Bertrand Delanoë et visant à instituer des « salles de shoot » dans notre capitale. Et si ces gens-là, après s’être shootés, s'avisaient de prendre le volant ? Nos bons esprits se sont-ils seulement posé la question ? Mais non, tout cela n’est que broutille. Il vaut mieux s’en prendre aux excès de vitesse (d’ailleurs commis en partie par les consommateurs de drogue) ou à l’alcool qui est si ringarde. La drogue, elle, c’est la jeunesse, c’est sympa, c’est surtout politiquement correct. Donc on n’y touche pas et surtout, on n’en parle pas. Il est significatif que les bilans de l’ONISR s’abstiennent de préciser le détail des types de stupéfiants détectés sur nos routes.

Certes, le cannabis n’est pas la seule drogue en cause, la cocaïne causant aussi de nos jours des ravages redoutables. Et ce, d’autant plus que si la consommation de cannabis double le risque d’être responsable d’un accident mortel, la prise de cocaïne multiplie quant à elle ce risque par huit … et qu’accessoirement, les prix de la cocaïne ont dramatiquement chuté au cours de ces dernières années. De récents accidents commis par des chauffeurs routiers sous l’emprise de la cocaïne ont mis en lumière le fait que ce type de drogue est consommé aujourd’hui par des milieux très diversifiés qui le tiennent pour un produit dopant (à l’instar des amphétamines, par exemple).

Il est donc grand temps que les pouvoirs publics se saisissent du problème de la drogue au volant dans toutes ses dimensions et surtout, se gardent de le considérer d’un point de vue essentiellement idéologique quand ce n’est pas électoraliste. Après tout, sauf erreur ou omission, la consommation de drogue reste toujours sanctionnée par notre Code pénal.

La drogue est un fléau galopant, y compris sur nos routes. Ne pas voir ce phénomène ou le minorer est déjà irresponsable. L’encourager revient à s’en rendre complice. Hélas, nos parlementaires sont déjà trop occupés … à faire voter la réforme dite de « désarmement pénal » souhaitée par Mme Taubira ou à satisfaire le fantasme de Mme Vallaud-Belkacem d’instaurer des sanctions contre les clients de prostituées.