jeudi 11 juillet 2013

Des statistiques en trompe l’oeil


A force de vouloir démontrer à tout prix, non seulement on ne démontre plus rien mais les statistiques censées venir à l’appui du raisonnement perdent de leur légitimité. Qui aura l’inconscience de soutenir que les 86,8 % de réussite au bac signifient encore quelque chose ? De même peut-on s’interroger sur la baisse de 15% de morts sur les routes françaises que claironne, à grands renforts de complaisance médiatique, notre ministre de l’intérieur.

Bien sûr, on apprendra sans surprise que cette baisse est deux fois plus importante que celle enregistrée l’année précédente : ah ! Ce fameux héritage du président Sarkozy. On peut gager qu’il nous sera resservi jusqu’en 2017.

Cela étant, 257 vies épargnées ce n’est pas rien sur un bilan total qui, l’an dernier, s’élevait à 3 645 tués. Galvanisé par cette amélioration, Manuel Valls a s’est fixé un objectif de 2 000 victimes sur les routes d’ici 2020. Et, pour ce faire, n’a pas manqué d’annoncer une multiplication des radars autoroutiers ainsi qu’une diminution probable de la vitesse autorisée (70 km/h contre 80 actuellement) sur le périphérique parisien.

Bref, plus ça change et plus c’est la même chose. La vitesse, uniquement la vitesse, encore et toujours. Nos voisins européens s’esclaffent face à une obsession affichée avec une telle constance : les Allemands, par exemple, qui n’ont pas jugé bon de limiter la vitesse sur leurs autoroutes ; ou encore les Anglais qui ont supprimé progressivement les radars autoroutiers. Il est vrai que ces gens sont inconscients et n’attendent que l’exemple de la France – pardon, le « modèle français » - pour revenir sur le droit chemin.

Pour revenir à la statistique de la baisse de 15%, il faut une sacré dose de mauvaise foi pour en attribuer tout le mérite à la lutte psychotique menée par les pouvoirs publics contre la vitesse routière. Chacun peut imaginer que les progrès constants dans la conception même des véhicules ne sont pas pour rien dans cette amélioration globale de la sécurité. Il en va de même dans les courses de F1 avec une baisse de la mortalité sur les circuits alors même qu’on ne saurait prétendre que la vitesse de ces bolides a diminué …

Il existe un autre facteur soigneusement passé sous silence par les pouvoirs publics qui tiennent au phénomène saisonnier. On sait que les véhicules roulent moins globalement (surtout les deux-roues qui sont particulièrement impliqués, fauteurs ou victimes, dans la statistique sur les accidents) par mauvais temps. Or, le premier semestre a été climatiquement pourri et il est probable que le volume de la circulation routière ait fléchi durant cette période. Moins de circulation donc moins d’accident. Est-ce si difficile à comprendre ?

Il y a enfin et surtout, les autres facteurs accidentogènes qui sont de facto relégués dans l’ombre à se focaliser ainsi sur la vitesse : l’incivilité dans la conduite en ville (absence systématique de clignotants, non-respect inquiétant des deux tricolores ou de la priorité) et surtout l’alcool au volant  qui devrait devenir la priorité absolue. L’alcool et … les stupéfiants dont on sous-estime méthodiquement les conséquences létales. 

Mais il ne faut pas rêver. Ce n’est pas à l’heure où le ministre de l’Education rêvait de libéraliser le cannabis dans nos collèges et où la municipalité de Paris, soutenue par le gouvernement, décide d’ouvrir des salles de shoot dans la capitale – en parfaite illégalité au passage – que le problème de la drogue au volant sera pris en considération. Ce n’est pas à la mode en un temps où la politique de sécurité est affaire de politiquement correct, quand ce n’est pas affaire de finances.

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