dimanche 6 avril 2014

Elections et pédale douce


La répression envers les infractions routières urbaines s’assouplit miraculeusement en période électorale. Ce soi-disant fléau ne serait-il qu’un prétexte ?

Il nous a tellement été asséné que nos centre-ville étaient asphyxiés à cause des automobiles et que les conducteurs étaient de mauvais citoyens insoucieux de l’environnement qu’on a fini par le croire. Seulement voilà : cette vérité universelle cesse de l’être, comme par miracle, durant les périodes électorales.

Dans certaines agglomérations, on a pu constater en effet quelque relâchement dans des contrôles qui s’exerçaient jusque-là avec une sévérité tatillonne au nom de l’intérêt général. Pour tout dire, à la veille des dernières élections municipales, des consignes ont été données discrètement par les édiles de plusieurs dizaines de communes à leurs forces de police de se montrer plus souples envers les contrevenants. Près d’une cinquantaine de cas auraient ainsi été répertoriés sur les 3 600 polices municipales que compte notre territoire. Une telle observation a été confortée par des témoignages qui sont remontés jusqu’aux services du Défenseur des droits.

Il n’est pas si facile de modifier du jour au lendemain des comportements dûment encouragés et  formatés au fil des années comme des dispositifs répressifs. Aussi des fonctionnaires de police ont-ils trouvé à se plaindre d’une telle mansuétude plutôt inattendue. Et ce, d’autant plus que cette mansuétude a pris généralement la forme de consignes orales, bien sûr, quoique parfois avec une insistance marquée.

Ces pratiques chafouines ont beau être considérées comme graves par la présidente de la Ligue contre les violences routières, Mme Chantal Perrichon, il ne faut pas être naïf. On peut tout à fait comprendre l’angoisse de tel ou tel maire sortant en train de jouer sa réélection. Ne pas indisposer l’automobiliste est en temps habituel le cadet de ses soucis. Mais tout change lorsque se profile la perspective du scrutin tant il est vrai que l’automobiliste est aussi un électeur. Il s’agira alors pour le maire de conseiller à ses agents municipaux de « sanctionner avec discernement » sinon de fermer carrément les yeux sur une infraction : et pas seulement l’infraction de stationnement, d’ailleurs, car la police municipale est habiliter à sanctionner pratiquement toutes les infractions routières.

Serait-ce à dire, au passage, que les agents municipaux d’habitude ne sanctionneraient pas avec discernement ? En tout cas, on ne pourra que relativiser les accusations sempiternelles et absolues qu’on prononce contre l’automobile, accusée de tous les maux urbains. En clair, la voiture dans nos villes est un fléau quand celui-ci peut être combattu sans risque. 

On se frottera les mains, du côté de l’Etat comme des collectivités locales, en encaissant le produit sans cesse croissant des amendes routières et notamment celles de stationnement : au nom de la sécurité publique, du décongestionnement des agglomérations, du droit des piétons voire des bons sentiments. Et ce, alors même que les élus peuvent ignorer tranquillement les protestations de leurs administrés, ces conducteurs exaspérés par les harcèlements répressifs. En revanche, ces impératifs perdent singulièrement de leur consistance à la veille d’un scrutin. Faut-il en déduire qu’ils ne sont que des prétextes commodes ou simple affaire de circonstance ? Poser la question revient à y répondre.

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