L’Italie
tarde à transposer dans son droit national des directives européennes. Et elle en
fait supporter financièrement les conséquences à plusieurs de nos
ressortissants.
Reconnaissons
volontiers que notre pays n’a pas tellement de leçon à donner à ses voisins en
matière de bureaucratie ou d’administration kafkaïenne. J’y ajouterai qu’ayant
personnellement une inclination avouée pour l’Italie, je répugne
aux caricatures faciles et autres raccourcis un peu trop commodes en ce qui
concerne ce pays. Et pourtant !
La mésaventure survenue
récemment à un de nos ressortissants niçois en Italie est assez édifiante.
Ayant acheté un véhicule d’occasion (onze ans d’âge) en Allemagne, il l’a
rapatrié en France sans problèmes, muni notamment de la carte grise d’origine
et d’un certificat de cession en bonne et due forme. Notre réglementation
nationale dispose que, dans une telle situation, le propriétaire dispose d’un
mois franc pour faire établir une carte grise française. Durant la période
intermédiaire, notre conducteur a contracté une assurance afin de pouvoir
circuler normalement.
C’est alors qu’il eut
la funeste idée de faire un saut en Italie, la frontière étant toute proche.
Pas de problème à l’aller avec les douanes françaises. C’est au retour que
l’affaire s’est corsée. Interpelé par les douanes italiennes à Vintimille, il
s’est vu confisquer son véhicule au motif que les plaques d’immatriculation
n’étaient pas conformes et qu’au surplus, son assurance n’était pas valide.
Moyennant quoi, il s’est vu infliger une série de quatre amendes pour un
montant total dépassant les mille euros ! En outre, il a dû signer les PV
d’infraction sans comprendre un traître mot de ce qui y était mentionné – les
carabiniers lui refusant le recours à un interprète – faute de quoi il eut été
incarcéré.
Enfin et surtout, il
lui a été signifié que son véhicule serait de toute façon immobilisé pour une
durée minimale de trois mois, qu’il s’acquitte ou non des amendes susdites. En
effet, une dernière amende doit être traitée à part par les services
préfectoraux d’Imperia et on n’en connaît pas encore le montant. Tout dépend
donc de la célérité de ces services pour le traitement en question et il n’y a
pas de raison pour que ces trois mois d’attente – en l’espèce, trois mois de
privation de son bien – n’en deviennent pas quatre voire six au final. Fermez
le ban !
Au-delà de la brutalité
du traitement réservé à notre ressortissant – et je me refuse à croire que
l’origine ethnique de son patronyme y ait été pour quelque chose – se trouve
soulevé un problème de droit lancinant. En effet, renseignements pris,
plusieurs dizaines de dossiers à peu près analogues impliquant des Français seraient
actuellement en souffrance auprès des juridictions italiennes.
Le problème résulte de
ce que l’Italie n’a pas encore transposé dans son droit national certaines
directives européennes prescrivant la prééminence donc l’application des
réglementations et législations nationales d’origine. Dans ce cas précis, c’est
bien le droit français qui aurait dû trouver à s’appliquer. Ce faisant, notre
conducteur n’avait commis aucune infraction. En effet, il disposait d’un
certificat de cession mentionnant l’immatriculation d’origine du véhicule, en
Allemagne. Il roulait donc normalement avec des plaques allemandes dans
l’attente d’une immatriculation française. Par ailleurs, il était couvert par son
assurance et était détenteur d’un permis de conduire en cours de validité.
Pourquoi tout s’est
subitement compliqué en Italie ? Les autorités compétentes de ce pays ont simplement
estimé que les plaques allemandes n’étaient pas valables, apposées sur un
véhicule dont le propriétaire était français et résidait en France. En
Allemagne, les plaques sont attachées à la personne du propriétaire du véhicule
et non à ce dernier. Elles restaient donc au propriétaire allemand même après
la vente par ce dernier de son véhicule. Les Italiens ont donc considéré que
notre malheureux propriétaire français roulait avec de fausses plaques et que
sa police d’assurance, en ce qu’elle renvoyait à l’immatriculation allemande,
n’était pas valide.
Notre malheureux
conducteur s’est ainsi trouvé, aux yeux de l’administration italienne, dans la
situation de recel d’un véhicule volé. On peut donc comprendre, tout en le
déplorant bien sûr, le raisonnement qui a été appliqué par l’administration transalpine.
En revanche, on a
beaucoup plus de mal à comprendre la sévérité voire l’autisme de cette même
administration envers des ressortissants peu au fait de la carence italienne
consistant à retarder la retranscription du droit européen dans le droit
national. En outre, dans le cas de notre compatriote, celui-ci ne pouvait être
regardé comme un voleur compte tenu du certificat de cession et de la carte
grise (cette dernière ayant été également confisquée au passage) dont il s’est
prévalu pour preuve de sa bonne foi. Enfin, la multiplication ubuesque des
amendes de même que leur montant astronomique, comparé à la nature de
l’infraction, font plutôt penser à un racket qu'à l’application sereine du droit
avec le discernement dont la justice italienne est, par ailleurs, tout aussi capable qu’une
autre. Ceci est d’autant plus consternant qu’une telle
intransigeance frappe le ressortissant d’un pays voisin et ami.
Sans évidemment se
prendre à souhaiter des mesures de rétorsion de la part de l’Etat français, il
apparaît aujourd’hui urgent que nos pouvoirs publics se saisissent de ce
problème pour le moins choquant.
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