lundi 16 juin 2014

Sécurité routière et privatisation


L’Etat privatise des pans entiers de la sécurité routière sans pour autant en avoir évalué tous les risques.
  
Il est cocasse qu’une telle tendance se dessine sous un gouvernement socialiste – même s’il est vrai qu’il se déclare aujourd’hui social-démocrate – mais les faits sont avérés : des pans de la sécurité routière sont déjà privatisés ou sur le point de l’être.

On sait que, depuis 2010, les radars de vitesse ne sont plus contrôlés par l’Etat mais par le constructeur même de ces radars à savoir la Sagem : c’est, en effet, cette dernière qui a passé l’appel d’offre puis désigné le prestataire de service en charge de ces contrôles, SGS Qualitest Industrie. Certains poussèrent en leur temps des cris d’orfraie, parfaitement justifiés au demeurant. Mais l’Etat ne s’est pas ému d’une telle confusion entre juge et parties.  

Il en va pareillement pour le Centre de Rennes en charge du contrôle automatisé, qui fait appel à un nombre croissant d’entreprises privées, parmi lesquelles Steria ou Anaya qui assument la responsabilité de plusieurs aspects de la chaîne de contrôle de sanction automatisée. A quand, les PV délivrés par des privés ?

D’ailleurs qui n’a déjà vu, dans certaines de nos villes, des agents de la police municipale effectuer des rondes dans les véhicules même de la fourrière privatisée ? Une connivence plutôt troublante mais qui ne paraît pas non plus gêner nos édiles.

Tout ce beau monde prétend fonctionner selon les critères bien connus de l’efficacité et de la rentabilité. Ces critères exigent une recrudescence drastique des sanctions et, tout particulièrement, de la verbalisation. Que celle-ci soit justifiée ou non, libre au « contrevenant » supposé de se lancer après coup dans le parcours du combattant de la contestation.

Viendrait-on à s’en étonner que la réponse est toute prête : sécurité routière, encore et toujours. Le grand mot est lâché et il ne souffre aucune réplique. Pour autant, tous les moyens seraient-ils bons ? Voire.

La tendance est dangereuse et nécessite à tout le moins une surveillance étroite afin d’éviter les dérives de collusion, conflit d’intérêt quand ce n’est pas de la corruption caractérisée.  

Voici à présent que l’Etat se lance dans la privatisation des examens du permis de conduire. Prenant le prétexte du racket auquel se livreraient les auto-écoles, il vient de décider de recourir à des centres agréés pour la prise en charge de la partie théorique de l’examen du permis. Raison officiellement invoquée : réduire le coût des examens, jugé trop élevé, et réduire les délais d’attente. Selon les experts, une telle mesure présenterait l’avantage de créer quelque 145 000 places supplémentaires pour le passage de la partie pratique de l’examen, qui continuerait à être supervisée par les inspecteurs actuels.

Quelle que soit la pertinence d’une telle mesure, il faut bien mesurer les conséquences du recours à des prestataires privés dans un domaine aussi sensible que la sécurité routière, ou même la gestion de la circulation intra-urbaine, qui reste d’essence régalienne. Si l’Etat venait à se dessaisir trop ouvertement de tout ou partie de ces domaines, il est à parier que la crédibilité de sa politique sécurité aurait à en souffrir. Mais peut-être, après tout, qu’un surcroît de recettes vaut bien un tel sacrifice …

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