mardi 26 février 2013

Bon sens



En cette fin de période de vœux, il n’est jamais inutile de saluer le bon sens, d’où qu’il vienne, tant il a tendance à se raréfier.

A preuve, ce jugement récent du tribunal correctionnel de Versailles relaxant un conducteur qu’on soupçonnait d’avoir commis 94 excès de vitesse au cours de ces deux dernières années, dont une dizaine de grands excès de vitesse. Le seul ennui est que personne n’était parvenu à mettre à jour d’une façon certaine l’identité du fautif. Rappelons que la charge de la preuve incombe toujours à l’accusation. Cependant la pratique de l’administration, trop pressée d’engranger le produit des amendes mais confortée, il est vrai, par certaines décisions juridictionnelles complaisantes pouvait laisser à penser que c’était à l’accusé de prouver son innocence : une de ces pratiques qui font que le droit routier est de plus en plus exclusif du droit commun. Il était donc temps qu’un magistrat siffle la fin de la récréation et c’est tant mieux. Il y en a plus qu’assez de ces méthodes arbitraires qui placent en permanence l’automobiliste dans une situation de délinquant sans que l’administration se donne la peine de démontrer quoi que ce soit. Et si elle est surencombrée, ce n’est certes pas le problème des justiciables.
Les vœux concernent également la baisse hautement souhaitable de la mortalité routière : 8% de tués en moins en 2012, c’est encourageant. Gageons, que notre ministre de l’Intérieur ne va pas s’engouffrer opportunément dans la brèche pour proclamer Urbi et orbi qu’il s’agit là d’une conséquence de la « présidence normale ». Gageons également, même s’il ne s’agit là que d’un vœu pieux, que nos fameux spécialistes de la sécurité routière ne saisiront pas cette opportunité pour préconiser une multiplication des radars routiers. Il reste tout de même un long chemin à parcourir : plus de 3 600 de nos concitoyens perdent encore annuellement la vie sur les routes.

Quand le bon sens se saisit de l’administration, cela donne des résultats parfois imprévus. Ainsi du retrait décidé des éthylomètres, dont une précédente mesure avait rendu la détention obligatoire pour les conducteurs. Jugés insuffisamment fiables, ces appareils ont été retirés du circuit. Il faut bien reconnaître que l’affaire relevait de la farce : comme s’ils allaient résoudre le problème de l’alcool au volant ! Ce problème ne relève pas tant de l’habileté technique que du courage politique. C’est bien là où le bât blesse. Il n’est donc guère surprenant que ce ne soit pas un politique mais un grand patron, amateur de grands crus mais aussi passionné d’automobile – et pour cause, c’est le PDG de Renault ! – qui jette le pavé dans la marre en préconisant une tolérance zéro pour l’alcool au volant. Finis les comptes d’apothicaires sur le nombre de verres ingurgités et le temps passé à les cuver avant de remettre le contact. Finis les seuils qui n’ont aucune signification sur le commun des mortels. Fini le temps des matamores qui se croient plus résistants à l’alcool que les autres. Désormais un seul principe, à la fois simple et compréhensible par le plus grand nombre : soit on boit et on ne conduit pas, soit on conduit et on ne boit pas. Et aucune tolérance à ce principe. Il ne faudrait pas attendre longtemps pour constater les résultats.

Certains disent que ce système draconien ne pourrait jamais marcher en France. Ce sont exactement les mêmes qui prétendaient naguère que l’interdiction totale de fumer dans les lieux publics ne marcherait pas. A l’époque, les pouvoirs publics avaient pris le risque de se mettre à dos le lobby des cigarettiers. Qui, aujourd’hui, aura le courage de s’opposer au lobby viticole qui ne manquera pas de hurler à la mort ? « Moi, président » ? Allons ce n’était qu’un vœu de début d’année…

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