mardi 26 février 2013

Ma grand-mère fait du vélo …



La Chine a de tout temps fasciné. En ces temps de mondialisation, les Occidentaux sont impressionnés par la machine économique chinoise, son marché et sa compétitivité. Pas la France nostalgique qui rêve de Pékin… dans les années cinquante : aucune voiture ou presque dans les rues mais des centaines de milliers de vélos s’entrechoquant joyeusement.

On en prend d’ailleurs tout droit le chemin. Passe encore qu’à Paris l’équipe municipale de B. Delanoë soit obsédée par l’idée de régler leur compte aux automobilistes : même si la plupart des membres éminents de cette équipe sont aujourd’hui d’heureux abonnés au « Club Affaires » des taxis G7, aux frais du contribuable parisien bien sûr. On sait bien, depuis des années, que c’est l’idéologie et non pas l’intérêt bien compris des Parisiens qui dicte l’actuelle politique municipale.

Mais il en va de même pour les grandes municipalités de province. C’est ce qu’on appelle l’effet de mode et, en l’espèce, l’engouement irrationnel et stupide pour le vélo.

Les pouvoirs publics ne se contentent évidemment pas de suggérer la mode. Ils fixent surtout de nouvelles règles. Cela fait à présent plus d’un an qu’a été autorisé le « tourne-à-droite » pour les cyclistes : « sous conditions », précisait benoîtement le décret ministériel du 12 novembre 2010 qui introduisait cette disposition dans le Code de la route. Qui se soucie aujourd’hui de ces prétendues conditions ? Qui ne voit quotidiennement les cyclistes brûler impunément le feu rouge et non pas seulement pour tourner à droite ? Qui aurait la naïveté d’imaginer qu’en cas d’accident on ne puisse donner tort à l’automobiliste qui, lui, serait passé au vert ? Qui aurait, de même, l’audace d’obliger les vélos à céder le passage aux piétons traversant la chaussée ?

On a introduit à la légère une permissivité dangereuse au motif, malgré ses conséquences aussi prévisibles que dommageables, qu’elle est politiquement correcte. En d’autres termes, on appelle cela de la démagogie. Précisons même aujourd’hui : une démagogie codifiée dans la mesure où le ministre des Transports lui-même a cru devoir instituer un panneau spécifique signalant l’autorisation aux cyclistes du « tourne-à-droite ». M. Thierry Mariani s’en est presque excusé : « Il est extrêmement rare qu’on crée de nouveaux panneaux de signalisation ».

C’est bien possible. Il est aussi extrêmement rare – c’est d’ailleurs le seul exemple au monde – qu’on institue un permis de conduire à deux vitesses. En revanche, il est moins rare dans notre pays si féru de réglementation et de codification, rigide et opaque de préférence, qu’on crée de nouvelles dispositions contraignantes. Ainsi de l’annonce prochaine d’un arrêté fixant la surface obligatoire dédiée dans les immeubles neufs aux locaux à vélo à 1,5 m2 par appartement de type T3 et plus, et 0,75 m2 pour les T2. Gageons qu’on créera prochainement un corps de fonctionnaire chargé de vérifier la bonne application de cette règle surréaliste. Même la bureaucratie chinoise – y compris celle du temps de Mao – n’avait jamais dû y penser.

Nous sommes au pays de Descartes et s’il revenait aujourd’hui, le philosophe estimerait que la stupidité, encore mieux que le bon sens, est la chose du monde la mieux partagée. A propos de vélo, on a encore l’exemple de la ville de Nice qui multiplie allègrement les pistes cyclables et les files à contresens pour les vélos. Un détail : Nice reste la métropole française qui comporte la plus forte proportion de personnes âgées. A-t-on pensé à elles quand elles traversent la chaussée et ne savent plus de quel côté se retourner avant de s’engager ? A moins que nos brillants édiles se soient mis en tête que nos grands-mères font aussi du vélo ?

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