mardi 26 février 2013

Pantalonnade ou jeu de dupes ?



Le problème, au fond, avec le dossier de la circulation routière tient à ce qu’il est difficile de l’aborder d’un esprit serein. Les associations de victimes, aussi respectables soient-elles, n’ont de cesse qu’elles ne diabolisent la voiture et transforment tous les automobilistes, indistinctement, en chauffards. L’Etat, lui, est schizophrène, partagé entre le souci de ménager une industrie automobile pourvoyeuse d’emplois et de prendre en main la sécurité des usagers, non sans avoir un œil attentif sur les recettes croissantes provenant des amendes routières.

Pour les automobilistes, c’est beaucoup plus simple. Appuyée sur le politiquement correct une fraction de nos élites – ceux qui bénéficient de voitures de fonction avec ou sans chauffeur ou sont abonnés au « Club Affaires » de la G7 – rejettent leurs arguments avec mépris : étant entendu que l’automobiliste ne peut être qu’un « beauf », un populiste mal dégrossi voire un poujadiste.

Toutefois, chercher absolument à complaire à ce politiquement correct ne vas pas sans risque, surtout en période pré-électorale. Les pouvoirs publics viennent d’en mesurer les difficultés avec la fronde de 73 députés UMP contestataires à qui certains se sont empressés d’accoler l’étiquette de « droite populaire » afin de mieux les dénigrer.

Après avoir fait adopter de nouvelles mesures par le Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) le gouvernement a en effet suscité une bronca de la part d’associations comme l’Afftac ou 40 millions d’automobilistes. Il a aussi provoqué la colère des fournisseurs d’avertisseurs radars (lesquels « pèsent » 2 000 emplois pour 6 millions d’usagers). Pas étonnant, dès lors, que certains parlementaires se soient fait l’écho de la base, cette base dont on entend faire le bonheur malgré elle.

Sauf à considérer que le simple bon sens est poujadiste, cette réaction est naturelle. Elle illustre l’incompréhension des automobilistes envers une logique publique sans cesse plus opaque. Croit-on vraiment qu’en dehors d’une fraction marginale d’irresponsables la grande masse des conducteurs est imperméable aux impératifs légitimes de la sécurité routière ? Encore faut-il que les stratégies publiques soient limpides et dépourvues d’ambiguïté, ce qui est loin d’être le cas.

D’un côté, en effet, la dimension financière est en train de véroler l’ensemble d’un dispositif de sanction-répression mû par des exigences de rentabilité. Soyons clair, tant qu’on n’ôtera pas de la tête des automobilistes l’idée tenace suivant laquelle l’Etat cherche à gagner de l’argent sur leur dos, toute ambition pédagogique sera proprement fantaisiste. Comme est fantaisiste la trouvaille des radars soi-disant « pédagogiques » en réplique à ceux qui estiment en toute bonne foi que la multiplication des radars routiers ne saurait être une réponse univoque aux problèmes de la sécurité routière.

Quant à l’ambiguïté, il suffit de considérer les contorsions du ministre de l’intérieur pour maintenir ses mesures tout en donnant l’impression de vouloir entrer dans une pseudo concertation. A son habitude, le président Sarkozy multiplie les déclarations péremptoires. M. Guéant, lui, affecte de camper ses positions tout en faisant mine d’accepter une négociation avec les professionnels. Faux-semblants, reculade en trompe-l’œil, jeux de dupes ? Les automobilistes ne savent plus sur quel pied danser et ne voient dans ces valses hésitations qu’une pantalonnade.

Ah oui ! Une chose tout de même : on vient de dire aux conducteurs que leurs « avertisseurs de radars » vont devenir des « aides à la sécurité ». Ils signaleront non plus les lieux d’implantation des radars mais les points noirs et sites accidentogènes. Les gens de bon sens présumeront que ces sites sont identiques. Ils auront tort : les radars fixes n’ont pas vocation à être implantés dans les endroits dangereux mais dans les endroits supposés rentables. Nuance …

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