mardi 26 février 2013
Les pièges du contrôle routier
Que faire ou ne pas faire lorsque vous êtes interpellé au volant de votre véhicule ? Quels documents les agents de la force publique sont-ils en droit d’exiger de vous ? Plusieurs lecteurs de ce blog m’ont récemment interrogé sur les modalités du contrôle routier, souvent sur le ton exaspéré de ceux qui s’estiment victimes de l’arbitraire policier.
Ce qu’on appelle communément le « contrôle routier » recouvre des réalités juridiques en théorie très différentes, la distinction principale portant entre le contrôle des titres de conduite et le contrôle d’identité.
Selon l’article R.233-1 du Code de la route, le contrôle des titres de conduite s’impose à tous sur simple réquisition de l’autorité compétente et sans que celle-ci ait à s’en justifier. Il en va notamment ainsi du permis de conduire dont le défaut de présentation vous expose à une contravention de 1ère classe, soit 17 euros. Si vous vous abstenez de présenter ce document dans les cinq jours après l’infraction, vous encourez une amende supplémentaire de 4ème classe (135 euros). Bien sûr, l’addition se corse si vous circulez sans permis, si celui-ci a été suspendu voire annulé ou encore si vous présentez un permis de conduire ne correspondant pas à la catégorie du véhicule dans lequel vous avez été interpellé (contravention de 5ème classe).
Outre le permis de conduire, les pièces à fournir impérativement et en toute circonstance sont : la carte grise, l’attestation d’assurance et l’attestation de contrôle technique. Il est à noter que le défaut d’attestation d’assurance expose le contrevenant à une amende de 5ème classe, outre une suspension du permis pouvant aller jusqu’à trois ans. Le défaut d’apposition de la vignette d’assurance sur le pare-brise du véhicule expose le contrevenant à une amende de 2ème classe même s’il s’avère qu’il est effectivement assuré. Quant au défaut d’attestation de contrôle technique, il est passible d’une amende de 4ème classe.
S’agissant du contrôle d’identité, il existe un principe d’ordre général qui a été exprimé par une décision du Conseil constitutionnel d’août 1993 : les contrôles d’identité généralisés et discrétionnaires sont incompatibles avec le principe de liberté individuelle. Ils restent néanmoins possibles dès lors qu’ils se placent sous l’empire des lois de septembre 1986 et août 1993, reprises dans les articles 78-1 et suivants du Code de procédure pénale. On distingue habituellement le contrôle d’identité de police judiciaire et le contrôle d’identité de police administrative.
Les contrôles d’identité de police judiciaire se situent dans le contexte d’une infraction caractérisée : l’officier de police judiciaire est tout à fait habilité dans ce cas à contrôler l’identité du contrevenant, à charge pour le représentant de l’ordre de justifier dûment les raisons de son intervention.
Le cas des contrôles d’identité de police administrative sont plus tangents dans la mesure où, le plus souvent, il s’agit moins de réprimer que de prévenir. Que signifie la prévention ? Où commence-t-elle et où s’arrête-t-elle ? Ce dispositif repose en grande partie sur la loi du 10 août 1993 qui porte sur la prévention d’atteintes à l’ordre public, notamment en ce qui concerne la sécurité des biens et des personnes. Il incombe à l’OPJ, dans cette hypothèse, de justifier de circonstances particulières établissant le risque d’atteinte à l’ordre public.
Dans le contexte concret d’une interpellation, ces distinctions juridiques ressemblent parfois à des querelles byzantines sur le sexe des anges. En effet, si le conducteur interpellé alors même qu’il n’a commis aucune infraction, s’avise de demander à l’agent de la force publique sa qualité pour lui demander ses papiers d’identité ou encore la base légale d’atteinte à l’ordre public au nom de laquelle il agit, il risque fort de se retrouver confronté à un mur.
Pis encore, il advient parfois que les contrôles d’identité de police administrative se transforment miraculeusement en contrôles de police judiciaire (ce qu’attestent de multiples avis de la Commission nationale de déontologie de la sécurité) pour peu que viennent sur le tapis des allégations d’outrage à agent public ou autre rébellion contre la force publique. Ne deviendra-t-il pas difficile d’apporter la preuve – le plus souvent, en l’absence de témoins – que votre refus légal de justifier de votre identité ne s’apparente pas à une rébellion contre la force publique ?
La morale de cette analyse est que, même dans son droit et sauf à posséder sur le bout des doigts les textes législatifs et réglementaires ainsi que la jurisprudence, l’automobiliste n’a pratiquement jamais intérêt à contester lors d’un contrôle routier.
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