mardi 26 février 2013

Des discriminations pas si positives


Qui ne voit que la politique actuelle de sécurité routière se heurte à un problème d’acception sociale ? Si elle n’est pas acceptée par beaucoup de conducteurs, c’est que cette politique est inaudible ou peu compréhensible. Des exemples ?

D’abord, l’instauration de fait d’un code de la route à géométrie variable au détriment des automobilistes. C’est le résultat direct d’un effet de mode ou de la déférence des pouvoirs publics au politiquement correct, surtout en cette période préélectorale. A force de multiplier, à grands renforts de publicité, les couloirs à contresens en faveur des deux-roues ou de les autoriser à ignorer certains feux rouges, on constate aujourd’hui les dégâts : les cyclistes ignorent délibérément tous les feux rouges et prennent systématiquement toutes les voies à contresens.

Pourquoi se gêner d’ailleurs ? En cas d’accident avec un automobiliste, c’est à ce dernier qu’incombera la responsabilité dans quasiment tous les cas. Et ce, en vertu du fameux article balai du Code de la route (R. 413-17) selon lequel un automobiliste doit conserver en toute circonstance la maîtrise de son véhicule. D’un autre côté, le deux-roues contrevenant a peu de chance de se voir verbalisé par des représentants de l’ordre souvent complaisants. D’ailleurs ne le seraient-ils pas que le montant des amendes susceptibles de leur être infligées n’est en rien dissuasif et ne saurait se comparer à celles frappant les automobilistes.

Sur le plan des principes, il est choquant de voir un Code de la route à deux voire plusieurs vitesses et que la règle ne soit pas la même pour tout le monde. C’est le meilleur moyen pour que les usagers de la route ne le respectent plus ou se permettent des privautés substantielles : sauf erreur, c’est la définition de l’anarchie. Celle-ci semble s’être à présent installée sur la voie publique. Ne rêvons pas : le pli étant désormais donné, il sera très difficile pour ne pas dire impossible de ramener les deux-roues à une observance minimale.

Autre exemple, le débat actuel sur les peines planchers aux automobilistes qui est porté aujourd’hui devant le Conseil constitutionnel. Le débat est encore plus général qu’il n’y paraît. Un automobiliste cesse d’avoir les droits d’un citoyen normal dès lors qu’il met le contact de son véhicule. Les spécialistes du droit routier déplorent de plus en plus que cette matière tend à devenir juridiquement sinistrée, quand elle ne serait pas une « zone de sous-droit » sous prétexte que la contestation routière est devenue un contentieux de masse.

Ainsi, sur le plan juridictionnel, on se doute bien que le Conseil d’Etat, par plusieurs arrêts topiques, a récemment encouragé les tribunaux administratifs à une plus grande rigueur. En rognant au passage sur la transparence et les garanties que le législateur souhaitait donner aux automobilistes en contrepartie du dispositif automatique et dépersonnalisé que constitue la combinaison permis à points-radars automatiques.

Il est pourtant des pratiques qui ne sauraient perdurer sauf à être objets de scandale. Tel est le cas de ces amendes forfaitaires que ne reçoivent jamais certains conducteurs lesquels se voient automatiquement appliquer une majoration. Qui dira que toute contestation de bonne foi est impossible, l’administration comme les tribunaux faisant comme si la charge de la preuve incombait à l’automobiliste alors qu’elle doit peser sur l’administration.

Ce n’est pas, en effet, parce que l’administration est débordée et les tribunaux encombrés que l’automobiliste doit faire les frais de cette discrimination positive. Même en enrobant ces procédés expéditifs et très marginaux par rapport aux règles élémentaires de droit dans un discours sécuritaire de bon aloi.

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