mardi 26 février 2013

Radars : une logique perverse



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Radar sur le boulevard périphérique à Paris

Promise depuis longtemps, la vitesse supérieure a été enclenchée par les pouvoirs publics en matière de radars. Désormais il s’agit d’une course au quantitatif (3 373 radars fixes implantés à ce jour sur le territoire) mais aussi au qualitatif. Il suffit de considérer ces « bijoux de technologie » qu’on réserve aux automobilistes : radars de feux rouge en ville, radars tronçons ou radars discriminants sur les routes, sans compter ce qui se trouve encore dans les cartons.
Il n’en fallait pas moins à l’Etat pour compenser le manque à gagner occasionné par l’assouplissement du permis à points décidé au forceps par les parlementaires contre le gouvernement. Manque à gagner, c’est bien cela dont il s’agit. A l’heure actuelle, les amendes routières rapportent en gros 1,5 milliard d’euros, les sanctions radars en représentant à peu près la moitié. Comment un Etat aux abois sur le plan financier pourrait-il renoncer à une telle manne ? Non seulement il n’y renonce pas mais il fait de tout pour l’accroître : l’augmentation du coût des amendes de stationnement et la multiplication des radars constituent donc sa recette privilégiée.
A qui fera-t-on croire que la sécurité routière est autre chose qu’une priorité de second rang dans cette affaire ? Il n’est qu’à se pencher sur la carte mise à jour par le ministère de l’intérieur, le 6 avril dernier, pour comprendre que l’implantation des radars ne revêt aucune cohérence : disparités entre départements auxquelles s’ajoute le manque de concordance entre cette implantation et la localisation des « points noirs » les plus accidentogènes. La logique financière transparaît ainsi des décisions des pouvoirs publics visant à faire du « tout-radar » une potion magique, selon l’expression de Philippe Doucet du Figaro. A Paris seulement, deux fois plus de radars seront mis en service d’ici la fin de 2011.
Si la sécurité routière était la finalité réelle, comment s’expliquerait cette focalisation obsessionnelle de la vitesse au volant, notamment sur nos autoroutes (une centaine de victimes sur les 4 000 qu’on enregistre annuellement en France) ? Pourquoi l’Etat, au lieu de s’en prendre à une de ses conséquences, ne s’attaque-t-il pas au cœur de ce véritable fléau que représente l’incivilité au volant ?
Aucun des rapports administratifs rendus public à ce jour n’a été aussi loin que le dernier baromètre d’Axa Prévention sur le comportement des Français au volant. Malgré toutes les campagnes gouvernementales et les dispositifs de répression de plus en plus sophistiqués, il ressort en effet que les automobilistes « n’ont plus conscience des dangers de la route ». Cherchez l’erreur alors que deux conducteurs sur trois ne s’arrêtent plus au feu orange, que plus d’un sur deux ne juge plus nécessaire de mettre le clignotant et qu’un Français sur six envoie ou consulte des SMS au volant … Il s’agit bel et bien d’un relâchement général sur la route.
Alors ? A un problème bien réel, les autorités répondent une fois de plus par de fausses solutions qui renvoient à peu près toutes au dénominateur commun de la répression. De l’effet d’annonce, du sensationnel mais peu d’efficacité. C’est tellement vrai que l’Etat omet parfois au passage de rester dans le cadre de la loi, ce qui est un comble ! Il apparaît ainsi de plus en plus que les radars (appareils fixes comme lunettes laser) sont contrôlés par l’administration elle-même alors qu’ils devraient l’être par des organismes indépendants agréés. Cette situation de juge et partie frappe inévitablement d’illégalité un grand nombre de PV dressés depuis décembre 2009.
De son côté, la justice semble prendre conscience des dangers du manque de transparence au détriment des automobilistes entraîné par le caractère sans cesse plus systématique et automatisé des sanctions routières.
Impavide, le gouvernement entend rester droit dans ses bottes. « Non pas sanctionner mais rechercher plus de sécurité par la pédagogie » : la parole officielle, par la voix de M. Guéant, tourne aujourd’hui à vide. Aussi vrai que l’objectif fixé par le président en 2007 de passer sous la barre des 3 000 morts à la fin de son mandat quinquennal n’est plus qu’un mirage.

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